scoop Facebook



Accueil > Mémoires d’un touriste

Mémoires d’un touriste

« C’est un fort joli chemin que celui qui suit la crête du coteau d’Ingouville. À gauche on plonge sur l’océan dans toute son immense étendue ; à droite ce sont de jolies maisons d’une propreté anglaise, avec quelques arbres de cinquante pieds, suffisamment vieux. À l’extrémité du coteau, vers les phares, j’ai admiré un verger normand que je tremble de voir envahi par les maisons ; déjà un grand écriteau annonce qu’il est à vendre par lots. C’est donc pour la dernière fois probablement que j’y suis entré ; il est planté de vieux pommiers, et entouré de sa digue de terre couverte d’ormeaux, dont la verdure l’enclot de tous côtés, et lui cache la vue admirable. […]
À gauche donc on a la mer ; derrière soi c’est l’embouchure de la Seine large de quatre lieues, et au-delà la côte de Normandie, au couchant d’Honfleur, où je me promenais hier ; cette côte chargée de verdure occupe à peu près le tiers de l’horizon. Pour le reste, c’est le redoutable océan couvert de navires arrivant d’Amérique, et qui attendent la marée haute pour entrer au port. »

STENDHAL, Mémoires d’un touriste, 1838. Citation extraite de Voyages en France, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1992, p. 338-339.